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Des sinistres prisons
sous l'Ancien Régime

Ancien Régime

La forteresse du Grand Châtelet fut en même temps qu'une prison, le site de la justice prévôtale de Paris. Elle fut démolie en 1802 pour dégager l'actuelle place du Châtelet.

Le Grand Châtelet sous l'Ancien Régime

le grand châtelet sous l'Ancien Régime
A Paris, sous l'Ancien Régime, le principal lieu de réclusion pour les prisonniers était le Grand Châtelet, forteresse datant du IXe siècle et plusieurs fois reconstruite. La prison proprement dite était située dans la partie Est. Dans le haut du gros donjon étaient installées les chambres à pistoles. Plus bas, au premier étage, s'étendait une grande salle voûtée où pouvaient s'entasser une centaine de pailleux. Au milieu de la salle, un large baquet pierre rempli d'eau servait aux ablutions.
En contrebas se trouvaient des cachots plus ou moins obscurs, mal aérés, sortes de caves aux murs suintants qui ouvraient sur des soupiraux au ras du sol. Ils portaient des noms sinistres ; la Fosse, le Puits, la Barbarie, Fin d'aises, l'Oubliette. La Fosse avait la forme d'un entonnoir renversé. Pour descendre un détenu dans l'Oubliette, on le faisait glisser à l'aide d'une corde et d'une poulie de cuivre.
Les prisonniers expédiés dans ces culs-de-basse-fosse ne pouvaient survivre longtemps. Il s'agissait évidemment de grands criminels. Fut ainsi incarcéré, au XIVe siècle, un individu ayant empoisonné son père, sa mère et ses deux soeurs pour toucher seul l'héritage familial.
En 1560, une ordonnance de Charles IX décida qu'aucun cachot ne devrait plus être situé au-dessous du niveau du sol. Elle ne fut pas respectée.
Au cours des siècles, bien des malheureux firent la connaissance des geôles du Grand Châtelet. Au XVe siècle un mauvais garçon, plusieurs fois arrêté pour vol, rixes et autres scandaleuses aventures, fut condamné à être pendu, mais échappa finalement à la corde : il se nommait François Villon, dont la fameuse ballade des Pendus reste dans toutes les mémoires. Au siècle suivant Clément Marot, accusé de sympathies huguenotes, fut également l'hôte forcé du Grand Châtelet. Il a dépeint le décor sinistre de la prison dans son poème l'Enfer.

La Conciergerie sous l'Ancien Régime

conciergerie sous l'ancien régime
A partir de la fin du XIVe siècle, le Grand Châtelet, trop exigu pour le nombre des détenus, eut comme annexes la Conciergerie du palais de Justice et le Petit Châtelet. Le Petit Châtelet n'était pas moins épouvantable que le Grand. On y trouvait là aussi des cachots souterrains appelés chartres basses, si mal aérés que les prisonniers n'y pouvaient demeurer plus de quelques jours sans risquer l'asphyxie. Cette prison fut démolie par ordre de Louis XVI, en 1782.
Par rapport au Châtelet, la Conciergerie passait pour une prison plus saine. La grande salle des gardes était cloisonnée en geôles pour les pailleux ou les pistoliers. D'autres cellules et dortoirs étaient aménagés autour d'une cour rectangulaire, le grand préau. Un autre quartier était réservé aux femmes.
L'aération était convenable mais les prisonniers n'échappaient pas toujours aux épidémies. Ainsi la peste se déclara à la Conciergerie en 1548 et en 1636 et il fallut transférer les détenus dans un autre établissement.
Les tours de la forteresse servaient à l'incarcération des prisonniers d'importance. Dans l'une d'elles fut logé Montgomery, le gentilhomme qui avait causé, accidentellement, la mort d'Henri II et qui, revenu en France après un séjour en Angleterre, avait combattu dans les rangs huguenots. Fait prisonnier, il fut décapité. Il donna son nom à cette énorme tour où, plus tard, on vit successivement Ravaillac et Damiens.
Ces deux régicides passèrent leurs dernières heures dans la tour, fers aux pieds et aux mains, avant de marcher au supplice. La tour Montgomery fut détruite en 1776, après un incendie.
Parmi les prisonniers les plus maltraités de la Conciergerie se trouvaient les condamnés aux galères, parqués dans des geôles avec des lourdes chaînes, jusqu'au jour où ils devraient gagner le port d'embarquement. Cette attente pouvait durer six mois. Les malheureux, parfois peu coupables, menaient une vie très misérable et subissaient mille sévices de la part des gardes-chiourme toujours prêts à abuser de leur force.
Ancien logement de l'officier royal, appelé concierge, la Conciergerie
fut convertie en prison en 1392.
Elle renferma sous la Terreur
plus de 1 200 prisonniers.

Des évasions spectaculaires

prisonniers sous l'ancien régime
Vincent de Paul, devenu aumônier des galères, obtint du roi que les forçats soient groupés, avant le départ de la chaîne, dans un lieu moins sinistre. On les transféra tout près de là, au château de la Tournelle, où ils reçurent un meilleur traitement. Mais l'amélioration ne dura pas et des révoltes éclatèrent, vite jugulées.
Sous Louis XVI, on comptait à la Conciergerie plus de deux cents détenus. Ce chiffre allait considérablement augmenter sous la Révolution...
Les autres maisons de détention parisiennes n'étaient pas plus avenantes. Dans la prison de l'Abbaye, des cachots étaient situés à dix mètres sous terre. La voûte en était si basse qu'un homme ne pouvait s'y tenir debout.
Les pires prisons, étaient peut-être celles de For-l'Evêque, ancienne prison de l'évêque de Paris, devenue prison d'Etat sous Louis XIV. Des magistrats qui visitèrent les cachots en 1776, peu avant la destruction du bâtiment par ordre de Louis XVI, les ont ainsi décrits :
« Ces cachots sont au niveau de la rivière, la seule épaisseur des murs les garantit de l'inondation et toute l'année l'eau filtre à travers les murs. C'est là que sont pratiqués des réceptacles de cinq pieds de large et six de long, dans lesquels on ne peut entrer qu'en rampant et où l'on enferme jusqu'à cinq hommes. L'on n'y pénètre que par une ouverture de trois pouces, percée au-dessus de l'entrée. »
Les malheureux rélégués dans de tels trous ne pouvaient évidemment garder l'espoir de s'enfuir. Des évasions spectaculaires se produisirent cependant, mais il s'agissait de détenus relégués dans les étages élevés et à qui une certaine liberté était accordée à l'intérieur des murs. Pailleux et pistoliers avaient, en effet, généralement le droit de se promener à travers la prison pendant le jour. Ils jouaient aux cartes ou aux dés, recevaient parfois des visites et pouvaient trouver des complicités à l'extérieur.
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L'ère des réformes
Après avoir visité différentes prisons de Paris, Malesherbes, ministre de Louis XVI, demanda l'abolition des lettres de cachet et la fin de toute détention arbitraire. Il énuméra dans un rapport les inconvénients de la réclusion forcée : la cruauté du système (surtout quand il s'agissait pour le coupable d'un isolement total), les dangers de la promiscuité, enfin le prix que les internements coûtaient aux finances publiques. Selon lui, au lieu d'enfermer les condamnés dans des cellules, on ferait mieux de les envoyer travailler en plein air, dans des conditions saines (par exemple au défrichement des terres incultes).